Le 17 août 2025, Madagascar accueillera le 45ᵉ sommet de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) et prendra officiellement la présidence tournante de l’organisation. Une première depuis son adhésion en 2005. Ce passage de relais, en provenance du Zimbabwe, marque un retour symbolique et stratégique de l’île sur la scène régionale, quinze ans après sa suspension pour cause de crise politique.
Ce sommet, qui réunira les chefs d’État des 16 pays membres, incarne une étape importante pour le président Andry Rajoelina, désormais à la tête de la Troïka du Sommet. Ce rôle confère à Madagascar une place de premier plan dans l’orientation stratégique de la SADC jusqu’en 2026. C’est aussi un test personnel pour Rajoelina, qui cherche à asseoir son autorité dans une organisation au PIB combiné de plus de 840 milliards de dollars. Malgré cet enjeu économique, le pays doit composer avec une influence encore marginale au sein du bloc, face à des acteurs dominants comme l’Afrique du Sud ou l’Angola.
L’accès à la présidence de la SADC clôt une longue parenthèse pour Madagascar, suspendu en 2009 après le coup d’État mené par Andry Rajoelina lui-même. Depuis sa réintégration, l’île cherche à normaliser ses relations diplomatiques et à réaffirmer sa place dans les instances régionales. L’échec récent de la candidature de Richard Randriamandrato à la tête de la Commission de l’Union africaine montre néanmoins les limites actuelles de cette ambition.
Le mandat de Madagascar s’ouvre dans un climat de tension régionale. La SADC peine à répondre efficacement à la crise post-électorale au Mozambique et à l’enlisement du conflit dans l’Est de la RDC. Le retrait annoncé de la mission militaire SAMIDRC, décidé en mars 2025, illustre les divisions internes de l’organisation. Par ailleurs, l’insécurité alimentaire persistante touche plus de 40 millions de personnes dans la région, alimentée par les effets du changement climatique, la pauvreté et les conflits armés. Sur le plan économique, l’incertitude autour de la reconduction de l’AGOA, un programme commercial crucial pour plusieurs membres, inquiète.
Le leadership malgache sera scruté à l’aune de sa capacité à faire émerger un consensus dans une organisation minée par les intérêts divergents. Si l’Afrique du Sud exerce une influence déterminante, elle suscite aussi des crispations, comme l’ont rappelé plusieurs experts, dont Saurombe Amos du BRICS Think Tanks Council. L’ISS Africa souligne par ailleurs le manque de cohésion qui a plombé l’efficacité de la SAMIDRC, pointant les limites d’un pilotage collectif fragile.
Pour Antananarivo, cette présidence représente une vitrine diplomatique et une occasion de faire valoir ses priorités. Le gouvernement pourrait chercher à relancer des dossiers stratégiques tels que l’interconnexion énergétique régionale, la résilience climatique ou encore l’accélération de la mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale (ZLECAF). Mais pour espérer peser durablement, Madagascar devra sortir du rôle de figurant et proposer une vision claire, crédible et fédératrice pour la région.