Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, la flotte russe contrôle la mer Noire et la mer d’Azov, laissant des millions de tonnes de céréales coincées dans des silos, à terre ou sur des navires. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky demande à la communauté internationale de débloquer ces ports pour reprendre les livraisons et éviter une crise alimentaire mondiale.
Surnommé la perle de la mer Noire, Odessa est le seul port d’Ukraine doté de capacités technologiques et logistiques suffisantes pour accueillir les flux commerciaux entrants et sortants. C’est par cette cité portuaire du sud de l’Ukraine, troisième ville du pays, que partent trois quarts des exportations ukrainiennes de céréales et d’acier. Ce qui donne à Odessa une position de quasi-monopole dans le commerce extérieur ukrainien.
En 1823, Alexandre Pouchkine, qui venait de passer un triste séjour à Kichinev, déclara à propos d’Odessa qu’on y « respire l’Europe ». De la vocation maritime de la ville témoignent ces quelques vers tirés de son roman le plus célèbre, Eugène Onéguine : « [là-bas] le commerce hisse ses voiles, il est actif et opulent ».
Des millions de tonnes de marchandises
Il faut dire que la cité fondée en 1794 par l’impératrice Catherine II a connu une croissance rapide. Devenue port franc en 1819, elle l’est resté jusqu’en 1859. Base navale durant l’époque soviétique, Odessa est redevenue en 2000 et pour 25 ans un port franc et une zone franche.
Aujourd’hui, Odessa n’est plus un port unique, mais un véritable ensemble portuaire constitué de trois unités distinctes, chacune spécialisée dans le traitement de différentes marchandises.
D’Odessa sont exportés les produits métallurgiques et 100% du pétrole importé de l’étranger entre dans le pays par ce port. Par Yuzhniy, situé dans la banlieue sud, transitent des cargaisons de produits chimiques, de minerai de fer ainsi que de charbon produits dans le pays. Par le troisième port, Tchernomorsk, situé au sud-ouest d’Odessa, est expédiée la totalité des produits agricoles ukrainiens, principalement le blé.
Sachant que les trois ports sont les seuls du pays à disposer de bassins suffisamment profonds pour accueillir les gros porte-conteneurs. Au total, plus de 91 millions de tonnes de marchandises ont transité par les trois unités portuaires d’Odessa en 2019.
Au bord d’une pénurie
Le blocage des ports ukrainiens par la Russie a alimenté, selon les experts, la volatilité sur les marchés financiers mondiaux, contribuant à la flambée des prix des matières premières. « Pour la première fois depuis des décennies et des décennies, ici à Odessa il n’y a pas de mouvements réguliers de la flotte marchande, il n’y a pas de travail portuaire routinier », a déclaré le président ukrainien après s’être entretenu avec le président du Conseil européen Charles Michel, en visite à Odessa.
Les silos à grains ukrainiens sont pleins, près de 4,5 millions de tonnes de grain croupissent dedans, la nourriture ne peut ni sortir ni entrer. Des centaines de millions de personnes dans le monde dépendent de ces approvisionnements et la situation devient urgente. Selon Programme alimentaire mondial (PAM) les ports de la région d’Odessa doivent être rouverts pour éviter que la crise alimentaire mondiale ne devienne incontrôlable.