À trois mois de la présidentielle camerounaise, le ministre de la Communication René-Emmanuel Sadi a déclaré ce 7 juillet sur RFI que la candidature du président Paul Biya restait incertaine : « C’est du 50/50 », a-t-il affirmé. En refusant de confirmer l’intention du chef de l’État, 92 ans, à briguer un nouveau mandat, le porte-parole du gouvernement entretient un suspense soigneusement orchestré autour de la figure centrale du régime en place depuis plus de quatre décennies.
Cette sortie intervient dans un contexte de turbulences internes au sein de la majorité présidentielle. Deux figures historiques de l’alliance au pouvoir, les ministres Bello Bouba Maïgari (UNDP) et Issa Tchiroma Bakary (FSNC), ont récemment quitté le gouvernement et annoncé leur candidature à la présidentielle. Si Sadi reconnaît que ces départs sont regrettables, il tente d’en minimiser l’impact, affirmant que le RDPC reste « debout et serein », grâce à son ancrage territorial et son appareil structuré. L’objectif affiché : conserver sa « position dominante », notamment dans le septentrion, bastion électoral clé.
Interrogé sur les critiques formulées par Issa Tchiroma, qui évoque une présidence « absente », Sadi rejette toute idée de vacance du pouvoir. Il défend un président actif en coulisses, informé, capable de « suivre les dossiers » malgré son grand âge. « C’est un mérite énorme à 92 ans », insiste-t-il. Le ministre balaie également les soupçons selon lesquels le secrétaire général de la Présidence, Ferdinand Ngoh Ngoh, tiendrait les rênes du pouvoir. Il admet que ce dernier anticipe parfois certaines décisions, mais affirme que c’est toujours Paul Biya qui tranche.
Face à l’empressement des autres partis à annoncer leurs candidats, le RDPC temporise. Pour René-Emmanuel Sadi, ce silence relève d’une stratégie maîtrisée, conforme aux délais légaux. La décision finale reviendra à Paul Biya lui-même, a-t-il rappelé, affirmant que ce dernier annoncera sa position « le moment venu ». L’objectif est double : maintenir la cohésion interne et garder la main sur le calendrier politique, tout en laissant planer l’incertitude pour affaiblir les ambitions adverses.
René-Emmanuel Sadi laisse clairement entendre que toutes les options restent ouvertes, insistant sur le fait que Paul Biya décidera « en son âme et conscience ». Tout en saluant la sagesse du président, il concède que « c’est du 50/50 », alimentant ainsi un climat d’attente et de spéculation. Ce flou, loin d’être anodin, permet au régime de gagner du temps, de sonder les rapports de force internes et d’évaluer les risques d’une succession ouverte.
En coulisses, l’hésitation du président divise. Si certains cadres du RDPC plaident pour une continuité, d’autres redoutent l’usure d’un pouvoir personnifié à l’extrême. La démission d’alliés de longue date, désormais candidats contre le parti présidentiel, traduit une fracture latente au sein de la majorité. En face, l’opposition observe, prudente mais lucide, un système où le culte du secret se substitue à un véritable débat démocratique.