Au Soudan du Sud, les violences envers les civils perpétrées par des milices et des forces de sécurité à l’instigation des autorités ont explosé en l’espace de douze mois selon un rapport établi par la Mission des Nations unies locales (Minuss). « Alors que le gouvernement avait annoncé des enquêtes, dans la plupart des cas, il n’y a eu ni investigation, ni inculpation, ni jugement », souligne l’un des enquêteurs, Andrew Clapham. Il estime « indispensable de remédier à l’impunité » dans ce pays.
Au Soudan du Sud, les chiffres sur les violences perpétrées contre la population civile sont vertigineux : +79% de meurtres de civils en 1 an, + 464% d’enlèvements de femmes et d’enfants, + 360% de violences sexuelles liées au conflit.
Dans un rapport publié cette semaine, les enquêteurs de la Commission des droits de l’homme de l’Onu dénoncent la persistance des attaques contre les civils et l’impunité.
Alors que des élections, longtemps retardées, sont prévues dans les dix-huit prochains mois, la commission appelle les autorités à Juba à mettre fin à l’impunité, indique au micro d’Alexandra Brangeon, un de ses experts, Andrew Clapham : « Notre rapport documente comment des représentants du gouvernement ont ordonné à des milices de commettre des meurtres à grande échelle, des viols systématiques et des déplacements forcés de civils dans le comté de Leer, une zone considérée comme loyale à l’opposition. Dans le comté de Tong Nord, nous avons noté que les forces de sécurité avaient lancé une campagne de violences contre les civils, alors même que les chefs des trois principaux organes de sécurité du gouvernement étaient déployés dans la région. »
Il poursuit : « Nous avons également documenté des exécutions sommaires dans le comté de Mayong, lors d’une opération militaire dirigée par des hauts responsables du gouvernement et de l’armée. Comme à Leer, à Tong nord, ceux responsables de ces violations des droits de l’homme n’ont jamais été sanctionnés et sont toujours en poste. Alors que le gouvernement avait annoncé des enquêtes, dans la plupart des cas, il n’y a eu ni investigation, ni inculpation, ni jugement. »
Andrew Clapham conclut : « Nous sommes de l’avis qu’il est indispensable de remédier à l’impunité, si nous voulons mettre fin à ces violations, et donner une chance à la stabilité et la paix. »
Le gouvernement de Juba a aussitôt rejeté ces accusations de violations des droits de l’homme et s’est opposé au renouvellement du mandat de la commission.
À noter que deux responsables locaux du Soudan du Sud, à la tête de milices pro-gouvernementales, Gatluak Nyang Hoth et Gordon Koang Biel, ont été sanctionnés par l’Union européenne le 7 mars 2023 pour « usage systématique des violences sexuelles comme tactique de guerre ». Le 8 mars, les autorités britanniques ont, elles, sanctionné le Major Général James Nando « qui a commandé les Forces de défense du peuple du Soudan du Sud, auteurs de violences sexuelles et sexistes dans le comté de Tambura en 2021 ».